A l’échelle mondiale, le cancer du col de l’utérus est, en terme de fréquence, le deuxième cancer touchant les femmes, avec 452 000 nouveaux cas par an, dont les trois quarts vivent dans des pays en développement. C’est le cancer le plus répandu parmi la population féminine de ces pays où il représente la première cause de mortalité chez les femmes d’une cinquantaine d’années. En effet, malgré l’importance de ce cancer en terme de santé publique, la plupart des pays en développement ne possèdent pas de programme de prévention efficace, si bien que le risque de cancer du col et la mortalité qui lui est associée, sont loin d’être maîtrisés. C’est d’autant plus regrettable que les cancers invasifs du col sont précédés par une longue période de la maladie à l’état précancéreux, période pendant laquelle les lésions précancéreuses peuvent être aisément détectées lors d’un test de dépistage, puis traitées de façon simple et efficace, permettant ainsi d’éviter leur progression vers un cancer invasif. On connaît l’efficacité du dépistage cytologique, malheureusement, il n’entre pas toujours dans les moyens des services sanitaires de nombreux pays en développement, ce qui justifie l’étude d’autres méthodes de détection précoce des néoplasies cervicales, en particulier les techniques reposant sur un examen visuel.
Il existe deux tests de dépistage des néoplasies cervicales qui font appel à une technologie simple et bon marché, à savoir, l’inspection visuelle avec l’acide acétique (IVA) et l’inspection visuelle avec le soluté de Lugol (IVL). Ces tests reposent sur la capacité d’un personnel de santé formé, à repérer au niveau de la zone de remaniement du col, des zones acidophiles qui blanchissent sous l’effet de l’acide, ou des zones jaunes iodo-négatives. Ces méthodes de dépistage sont actuellement en cours d’évaluation dans un cadre expérimental, comme alternatives à la cytologie conventionnelle. D’après les résultats publiés, l’IVA présente une sensibilité similaire à une cytologie de qualité, mais une moins bonne spécificité. Concernant l’IVL, les résultats préliminaires de plusieurs études en cours semblent indiquer qu’elle pourrait constituer un autre test de dépistage prometteur.
Cet ouvrage vise à faciliter la formation du personnel de santé - agents de santé, infirmières et médecins - à la pratique de l’IVA et de l’IVL. Durant les trois dernières années, des versions avant-projets de ce manuel ont ainsi servi de support pédagogique aux 22 stages de formation du personnel de santé qui ont eu lieu en Angola, au Burkina Faso, au Congo, en Guinée, en Inde, au Mali, en Mauritanie, au Népal, au Laos, au Sénégal et en Tanzanie. Ces cours étaient organisés dans le contexte d’études spécifiques d’évaluation de la prévention du cancer du col financées par la Fondation Bill & Melinda Gates dans le cadre de l’Alliance pour la Prévention du Cancer du Col Utérin (ACCP). Les commentaires en retour des participants à ces cours et des utilisateurs de ces tests, ont été particulièrement utiles à la correction des différentes versions de cet ouvrage, dont nous espérons qu’il répondra à la nécessité d’un support d’apprentissage simple permettant une formation correcte et appropriée du personnel de santé, et garantissant ainsi une excellente pratique de l’IVA et de l’IVL dans un cadre expérimental et clinique.
P. Kleihues M.D.
Directeur, CIRC
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